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Les Marquises Le Matin de Paris, 22 juin 1978
Les Marquises
Le Matin de Paris, 22 juin 1978
L’envers des Marquises
Paradis des vacanciers, les îles sont dures à vivre pour leurs habitants
Un paysage exceptionnel, un relief difficile, les îles dispersées des Marquises dorment au milieu du Pacifique, attendant on ne sait quel bouleversement pour s’épanouir à la consommation… L’isolement de ces « morceaux » de France est un attrait pour le voyageur qui s’émerveille du rythme du soleil, du pas des chevaux sauvages, de la lenteur de la nature. Mais il est difficile d’y vivre.
La vallée de Puamau est l’une des vallées privilégiées de l’île d’Hiva Oa puisqu’une piste récente et mouvementée y conduit (50 km = 4 heures). Marie-Antoinette Katouba, adjoint au maire de Puamau, explique « Avant la route, il fallait douze heures à cheval par les crêtes, je l’ai fait quand j’étais enceinte pour aller accoucher à Atuona. ici, il n’y a qu’un infirmier. »
Marie-Antoinette a été pensionnaire chez les sœurs d’Atuona, elle parle bien français ; pas son mari. Comme dans la majorité des couples marquisiens, elle est plus instruite parce que, aux Marquises, l’enseignement des garçons s’arrête plus tôt que celui des filles, faute d’écoles.
On bavarde en se protégeant des moustiques propagateurs de l’éléphantiasis. En bas sur la plage, c’est le festival des nonos, minuscules bestioles invisibles, nocives au point de rendre certaines vallées inhabitables.
Marie-Antoinette s’occupe de la “phonie” (la radio), seul moyen de télécommunication à heure fixe. En cas de panne, il ne reste quee la Land Rover, les quelques pirogues ou la très éventuelle goélette. Son mari, Vohi Heita chasse les animaux « divaguants »(bœufs, chevaux, cochons retournés à l’état sauvage), pêche et casse le coprah.
Impossible, à cause du relief, d’utiliser des machines pour la culture. Tout se fait à la main pour gagner, les mois fastes, environ 2 500 F Pacifique (137 F). Le riz, la bière sont un luxer. Bien sûr on mange des bananes, du poisson pour rien mais tout le superflu si nécessaire est hors de prix. Les trois commerces font crédit mais pas trop longtemps sous peine de faillite. Sur la cinquantaine de maisons éparpillées dans la vallée, beaucoup sont vides. Les Marquisiens partent vers Tahiti et ne reviennent plus.
Autrefois la vallée était prospère, bruissante de vie. Il faut lire Typee, un éden cannibale, d’Herman Melville, pour en avoir l’idée. Aujourd’hui tristesse et morosité, les jeunes surtout, s’ennuient et ne peuvent trouver d’emplois. La seule distraction est la prière dominicale chantée en commun dans la petite église qui depuis bien longtemps n’a plus de curé pour dire la messe. Cette vallée, ni la plus riche ni la plus pauvre, ressemble à toutes les autres. Un espoir pourtant : le nouvel aéroport en construction à Nuku Hiva qui permettra aux long-courriers d’atterrir (en 1980 ?) et qui insufflera peut-être aux îles une énergie nouvelle.
Catherine Domain
Ce qu’il faut voir
* Hiva Oa : la tombe de Gauguin, les plus grands tikis de Polynésie française à Puamau. 2 bungalows (2/3 personnes), 1 restaurant à Atuona.
* Nuku Hiva : les tikis de Taipivai, la cascade d’Hakani, les plateaux de Toovi. 2 bungalows, 1 restaurant à Taiohac. Possibilité de logement chez « Emmanuel », à Taipivai.
* Hua Pou : la première église marquisienne, les sculpteurs sur pierre et sur pierre, les tresseurs de nattes et de chapeaux en pandanu. Possibilité de logement chez M. Teikitutuua, dans le village de Hakahau.
* Ua Uka : les ruines de la vallée de Hane, l’île des oiseaux, les sculpteurs sur bois. Possibilité de logement dans le village de Hane (3 maisons à louer et une case de passage).
* Tahuala : cimetière des marins français, presbytère et vestiges archéologiques de la vallée de Vaitahu. M. Tetabi loue une maison dans le village de Vaitahu.
* Fatu Hiva : relief étonnant de la baie des Vierges, fabrication du tapa.. Une maison à louer dans le village d’Omoa.
Dans toutes les îles on peut faire des balades extraordinaires à cheval. Location d’un cheval avec une bonne selle et interdiction de le monter à deux : 500 CFP la demi-journée.
En général, le prix d’une nuit est de 500 CFP et le prix d’un repas varie entre 300 CFP et 600 CFP. Le change est 18,18 CFP pour 1 F français.
Pour tous renseignements, s’adresser au Commissariat à la promotion des départements et territoires d’outre-mer, 83, bd du Montparnasse, Paris-6° (325-899), qui a un bureau ouvert au public.
jeudi 26 novembre 2015, par